« Dans son message à la COP28, le pape François n’a rien abandonné de sa imaginative and prescient et des convictions »

Un pape au pays de l’or noir, en apôtre d’une « écologie intégrale » qui plus est ! L’affiche de cette première mondiale était alléchante. Las, la présence de François à la conférence des events (COP28) sur le climat de Dubaï, prévue du 1er au 3 décembre, a été annulée in extremis en raison de sa santé défaillante.

Sa visite dans cette cité de la démesure – symbole de l’alliance du pétrole, de la technologie et de la finance – lui offrait une tribune pour y envoyer un message sans concession. Le level d’orgue d’un pontificat amorcé en mars 2013, où son engagement en faveur d’une économie inclusive et d’une défense de l’environnement n’a jamais faibli.

Lu par le secrétaire d’Etat du Saint-Siège, Pietro Parolin, samedi 2 décembre, le message du pape n’aura pas le retentissement qu’il aurait eu s’il l’avait prononcé lui-même. Dans ce texte adressé au monde, mais surtout à l’aréopage de 140 cooks d’Etat et de gouvernement, de patrons des Big Oil, de banquiers et de lobbyistes, il n’a pourtant rien abandonné de sa imaginative and prescient et de convictions égrainées depuis son élection.

Pour le chef de l’Eglise catholique, « la dévastation de la création est une offense à Dieu ». Mais « l’heure est grave » et son discours s’est vite orienté vers une critique du système productiviste, dans une attaque à peine voilée contre le libéralisme : « La volonté de produire et de posséder s’est transformée en obsession et a conduit à une avidité sans limite, qui a fait de l’environnement l’objet d’une exploitation effrénée. » Rien de nouveau par rapport à sa lettre encyclique Laudato Si’ sur la sauvegarde de la maison commune, si ce n’est que la state of affairs a empiré depuis sa publication en 2015, s’alarme François.

Elle justifie plus que jamais l’« écologie intégrale » de Laudato Si’ dans laquelle « tout est intimement lié », l’économie et l’écologie, la défense des laissés-pour-compte et la safety de la planète. Une démarche « associant le cri des pauvres au cri de la Terre », résumera l’anthropologue et philosophe des sciences Bruno Latour.

A Dubaï, François a aussi fait souffler l’esprit de son exhortation apostolique Laudate Deum adressée aux 1,3 milliard de catholiques. Un texte plus accessible que Laudato Si’, fondement de la doctrine écologique de l’Eglise comme l’encyclique Rerum Novarum de Leon XIII (1891) avait assi sa doctrine sociale.

Publié à dessein avant la COP28, Laudate Deum dénonce les climatosceptiques et « les opinions méprisantes et déraisonnables qu’[il] rencontre au sein même de l’Eglise catholique ». Il pourfend surtout la domination d’un « paradigme technocratique [qui] nous isole de ce qui nous entoure » et fait des applied sciences (même s’il ne les exclut pas) le seul remède aux maux de la planète. Il s’agit là d’un « pragmatisme murder », tranche-t-il. Jusqu’à comprendre « les groupes fustigés comme “radicalisés “», qui « comblent un vide de la société », et à prôner « un changement généralisé du mode de vie irresponsable du modèle occidental ».

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