Avec plus de 1 million de websites de manufacturing, le système électrique français change d’échelle

Un employé travaille sur une ligne de production de panneaux solaires à l’usine Systovi de Carquefou, près de Nantes, France, le 29 mars 2024.

Changement d’échelle : la France compte désormais plus de 1 million de sites de production électrique sur son territoire, contre quelque 61 000 en 2010. La puissance totale du parc approche désormais les 150 gigawatts (GW), soit environ 26 de plus qu’il y a quatorze ans.

Cette démultiplication est surtout l’affaire du gestionnaire du réseau public de distribution, Enedis. La filiale à 100 % du groupe public EDF s’occupe des lignes de basse et moyenne tension, celles allant jusqu’aux foyers. Précisément, elle recense 1 026 854 sites de production raccordés à son réseau à travers le territoire, selon le décompte arrêté au troisième trimestre et communiqué le 23 octobre.

L’énergie solaire englobe déjà plus de 1 million de sites à elle seule – dont plus de 617 000 en autoconsommation, c’est-à-dire pour des particuliers ou des entreprises avec leurs propres panneaux photovoltaïques. En puissance, toujours à l’échelle d’Enedis, c’est plus équilibré : le solaire et l’éolien terrestre représentent respectivement maintenant 20,5 GW et près de 19 GW ; contre 0,3 GW et 4,4 GW en 2010.

« Enedis se prépare à gérer un système plus complexe, parce que plus décentralisé », déclare Cedric Boissier, son directeur du projet « Accélération des énergies renouvelables ». Pour décarboner le pays d’ici à la moitié du siècle, donc pour qu’il se défasse peu à peu des énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon), l’entreprise anticipe un rythme d’au moins 5 GW d’électricité renouvelable en plus chaque année.

« Le risque est que l’autoconsommation individuelle entraîne des formes d’indifférence à la solidarité offerte par le réseau électrique, de très nombreux particuliers accroissant leur propre autonomie, considère Gilles Debizet, enseignant-chercheur en aménagement et transition à l’université Grenoble-Alpes. D’où l’enjeu politique de développer aussi l’autoconsommation collective [impliquant plusieurs usagers]. »

Nouveaux défis

La profusion de petites installations a « forcément un impact sur les activités opérationnelles » d’Enedis, souligne M. Boissier. Avec « beaucoup plus de dossiers, il faut adapter nos équipes et nos systèmes d’information », poursuit-il. En février, la société de 40 000 salariés annonçait 1 600 embauches en CDI pour l’année en cours, ainsi que 1 200 contrats en alternance.

Au vu de leur part dans l’électricité produite, le solaire (4,4 % en 2023) et l’éolien (10,3 %) posent déjà de nouveaux défis. Intermittente au gré du soleil ou du vent, leur électricité n’est pas stockable à grande échelle, à la différence de celle des grands barrages hydrauliques. « Il faut aussi désormais, de plus en plus, s’assurer que la consommation d’électricité corresponde aux moments où l’électricité renouvelable et bas carbone est produite, résume Mathias Laffont, délégué général adjoint de l’Union française de l’électricité. Quitte à déplacer exprès une partie de la consommation pour la faire correspondre. »

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