Attaque de Magdebourg : sous pression, le gouvernement d’Olaf Scholz promet des explications

Le chancelier allemand, Olaf Scholz (2ᵉ à droite), la ministre allemande de l’intérieur, Nancy Faeser (2ᵉ à gauche), ainsi que le premier ministre du Land de Saxe-Anhalt, Reiner Haseloff (au centre), et d’autres responsables politiques, sur les lieux de l’attaque à la voiture piégée du marché de Noël à Magdebourg, le 21 décembre 2024.

Près de quarante-huit heures après l’attaque meurtrière à la voiture-bélier sur le marché de Noël de Magdebourg qui a fait cinq morts et 200 blessés, la pression politique s’accroît sur le gouvernement allemand. Ce dernier a promis une enquête pour clarifier d’éventuelles erreurs des autorités dans la prévention de l’attaque, dimanche 22 décembre.

« Les autorités chargées d’enquêter éclairciront tous les aspects de l’affaire », ce qui inclura « un examen minutieux des indices existants dans le passé et de la manière dont ils ont été suivis », a déclaré la ministre de l’intérieur, Nancy Faeser, au journal dominical Bild am Sonntag. L’Office fédéral de la police criminelle (BKA) soutient les enquêtes des autorités de Saxe-Anhalt, le Land de l’est de l’Allemagne dont Magdebourg est la capitale, a précisé la ministre. Les enquêtes des autorités de sécurité « sont menées à un rythme soutenu » et « chaque pierre sera soulevée », a-t-elle ajouté, dans un communiqué.

Signe de la pression sur le gouvernement du social-démocrate Olaf Scholz, à deux mois d’élections anticipées qui se tiendront le 23 février 2025 : Mme Faeser sera auditionnée dès le 30 décembre sur les dysfonctionnements ayant pu conduire à l’attaque. Elle sera interrogée, ainsi que plusieurs hauts fonctionnaires, par la commission parlementaire de contrôle et la commission des affaires intérieures du Bundestag (chambre basse du Parlement), a appris l’Agence France-Presse (AFP) de source parlementaire.

Nombreuses menaces de la part du suspect

Le chancelier social-démocrate, Olaf Scholz, qui s’est rendu sur place samedi aux côtés de Mme Faeser, a appelé les Allemands à « se serrer les coudes ». Mais l’attaque de Magdebourg alimente les critiques, en pleine campagne électorale. Depuis vendredi soir, les questions fusent sur les motifs qui ont poussé le suspect, un médecin saoudien de 50 ans, à commettre l’attaque qui a tué cinq personnes et en a blessé plus de 200 autres, et sur d’éventuels défauts d’alerte malgré les signaux inquiétants que l’assaillant présumé envoyait depuis des années.

Présenté à un juge samedi soir, il a été placé en détention provisoire. Selon le magazine Der Spiegel, les services secrets saoudiens avaient adressé il y a un an une mise en garde à leurs correspondants allemands du service fédéral de renseignement (BND) au sujet de Taleb A. En cause : un de ses tweets, dans lequel il menaçait l’Allemagne d’un « prix » à payer pour son traitement des réfugiés saoudiens. L’avertissement est resté sans effet, pendant que l’homme s’enfermait dans des discours complotistes, accusant l’Allemagne de ne pas protéger les Saoudiens fuyant l’islam rigoriste tout en accueillant des musulmans radicaux.

En août dernier, il écrivait encore sur son compte X : « Existe-t-il une voie vers la justice en Allemagne sans faire exploser une ambassade allemande ou égorger au hasard des citoyens allemands ? Je cherche cette voie pacifique depuis janvier 2019 et je ne l’ai pas trouvée. »

Le marché de Noël, où une voiture a foncé dans la foule, vendredi soir, à Magdebourg, en Allemagne, vide, dimanche matin, le 22 décembre 2024.

En 2013, il avait été condamné à une amende à Rostock pour « troubles à l’ordre public » et « menaces de commettre des crimes ». Même dans la communauté saoudienne exilée en Allemagne, l’homme effrayait : Mina Ahadi, présidente du Conseil central des anciens musulmans, l’a décrit comme un « psychopathe d’ultradroite conspirationniste » haïssant tous ceux qui ne partageaient pas sa haine.

La police allemande, après une évaluation « de risque » l’an dernier, avait jugé qu’il ne présentait pas de « danger particulier », rapporte Die Welt, dimanche. La veille de l’attaque, le psychiatre saoudien a ignoré une convocation judiciaire à Berlin, où il était poursuivi pour un esclandre dans un commissariat refusant d’enregistrer sa plainte, selon des médias allemands.

Hommages

« L’impéritie de l’administration, qui a permis l’horreur de Magdebourg, laisse sans voix », a critiqué Alice Weidel, la cheffe de file de l’extrême droite allemande, donnée en forte progression à deux mois des élections législatives. Même discours chez l’autre parti antisystème, de gauche radicale cette fois, BSW, dont la responsable, Sahra Wagenknecht, exige des explications après qu’un « si grand nombre de mises en garde ont été ignorées ».

Tout au long du week-end, les responsables politiques allemands ont défilé sur les lieux du drame à Magdebourg, où quatre femmes, âgées de 45 à 75 ans, et un garçon de 9 ans ont été tués dans l’attaque de vendredi. L’auteur présumé, monté à bord d’un puissant véhicule BMW, a fauché la foule en traversant à toute allure le marché de Noël. Le bilan pourrait encore s’alourdir, car une quarantaine de personnes sont grièvement blessées.

Le ministre délégué français chargé de l’Europe, Benjamin Haddad, se rend dimanche après-midi à Magdebourg « pour exprimer le soutien de la France au peuple allemand ».

Des personnes se recueillent devant les fleurs et des bougies laissées en hommage aux victimes près du marché de Noël, deux jours après l’attaque meurtrière, à Magdeburg, en Allemagne, le 22 décembre 2024.

Le Monde avec AFP

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