« Il est absurde de renoncer à un outil de politique monétaire parce qu’il doit être utilisé avec prudence »

Les banques centrales du monde entier ont réagi à la période inflationniste qui a suivi la crise due au Covid-19 en augmentant les taux d’intérêt. Maintenant que l’inflation semble largement maîtrisée, les responsables de la politique monétaire doivent commencer à se préparer à la prochaine crise en élargissant leur panoplie d’outils.

Cela est particulièrement important, car nous pourrions bientôt revenir à la situation des années 2010, lorsque les taux d’intérêt nominaux étaient proches de zéro et que les banques centrales n’étaient pas en mesure de stimuler la demande en les réduisant.

Les décideurs politiques ont fini par utiliser des outils « non conventionnels » – notamment l’assouplissement quantitatif [le quantitative easing ou QE] – qui se sont avérés par la suite avoir des effets limités sur la demande globale et avoir gonflé les prix des actifs, contribuant ainsi à la volatilité financière et à l’augmentation des inégalités.

De mauvaises raisons

Pour éviter de retomber dans ce piège, les banques centrales devraient se préparer, sur le plan tant juridique qu’opérationnel, à effectuer des transferts directs aux ménages en cas d’échec de la politique monétaire conventionnelle. Cette approche s’est révélée suffisamment efficace pour stimuler la demande et lutter contre les récessions, même dans une trappe à liquidités, lorsque les taux d’intérêt ne peuvent pas être abaissés. Cela dit, elle doit être utilisée avec précaution.

L’idée des transferts directs n’est pas nouvelle. Mais, jusqu’à récemment, les économistes l’ont rejetée pour de mauvaises raisons. L’argument classique contre ces paiements est que, lorsque les taux d’intérêt sont nuls, la création monétaire ne devrait pas avoir d’effet stimulant, car les ménages se contenteraient de conserver les liquidités excédentaires. L’augmentation de revenu résultant d’une telle aide, dit-on, conduirait à une augmentation négligeable de la consommation.

Cependant, nos recherches récentes contredisent ce point de vue. En utilisant de nouvelles données microéconomiques et des techniques d’évaluation, nous avons estimé que ces « paiements de relance » augmenteraient la consommation, même lorsque les taux d’intérêt sont proches de zéro. Ces résultats sont étayés par des recherches sur les gains à la loterie et sur le plan de relance américain de 2008, qui montrent que les ménages dépensent une grande partie des gains inattendus.

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