L’Armée nationale syrienne, groupe de rebelles affidés à la Turquie
Ankara peut se frotter les mains. Sans avoir déployé un seul soldat supplémentaire sur le théâtre des opérations du nord de la Syrie, le gouvernement turc est sur le point de voir se réaliser deux de ses plus anciens vœux : étendre son champ d’action au-delà des zones contrôlées par son armée, principalement dans les régions frontalières, et voir reculer les forces kurdes syriennes, liées au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) turc.
En moins d’une semaine, l’offensive spectaculaire, lancée le 27 novembre, du groupe islamiste radical Hayat Tahrir Al-Cham (HTC) en coordination avec ses alliés soutenus par la Turquie, a permis aux rebelles syriens de quasiment doubler le territoire qu’ils contrôlent en s’emparant d’Alep, la deuxième ville du pays, poussant vers le sud leur offensive jusqu’aux portes de Hama et reprenant, au nord, l’enclave stratégique de Tall Rifaat, contrôlée par les Kurdes. Cette dernière prise, obtenue dimanche par les combattants de l’Armée nationale syrienne (ANS), un groupement de milices pro-turques, éclaire l’étroitesse des relations entre Ankara et cette coalition de rebelles longtemps rivale de HTC. Elle révèle aussi l’efficacité avec laquelle la Turquie a su naviguer dans les complexités régionales.
Pendant des années, le pouvoir turc a été le principal soutien des groupes d’insurgés qui se sont soulevés contre le président Bachar Al-Assad en 2011. La volonté d’empêcher les militants kurdes de se masser à la frontière turque et celle de stabiliser le nord du pays pour y renvoyer les réfugiés syriens installés sur son territoire ont été les moteurs de cette politique d’intervention du président Recep Tayyip Erdogan en Syrie. Avec, comme point d’orgue, l’occupation des régions du Nord syrien, à partir d’août 2016, par les forces armées turques et leurs supplétifs de l’ANS.
Réputation de mercenaires
Comprendre la nature, l’organisation et les alliances changeantes de ce groupement de factions rebelles, armé et stipendié par Ankara, est « une véritable gageure », de l’avis même du spécialiste syrien exilé en Suède, Orwa Ajjoub. Formée par la Turquie, l’ANS comprend à la fois des groupes locaux et des unités venues des régions de Damas, Homs et Deraa. Certaines de ces factions, précise le chercheur de l’université de Malmö, sont pleinement alliées à la Turquie, comme la Brigade Sultan Suleiman Shah (SSSB), la Division Al-Hamza (HD) et la Brigade Sultan Mourad, tandis que d’autres, comme le Front du Levant (FL), Jaych Al-Islam et Ahrar Al-Cham, se sont efforcées de concilier leurs intérêts avec ceux d’Ankara.
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