L’Irlande, riche comme la Suisse mais pauvre en infrastructures

Le train DART en gare de Howth, dans la périphérie de Dublin, le 29 mai 2022.

Les averses se succèdent en cette fin novembre sur Greystones, petite ville côtière du comté de Wicklow, dans l’est de l’Irlande. On dirait que tous les visiteurs se sont réfugiés à la Scéal bakery, une boulangerie branchée sur la marina, en rez-de-chaussée d’un immeuble de standing tout neuf. On y sert d’appétissants croissants et même du kouign-amann, comme tout droit sorti d’une pâtisserie bretonne. Simon Harris, l’actuel taoiseach (premier ministre), a grandi à Greystones et il est député de la circonscription. La ville aux pubs rutilants et aux épiceries bio est l’une des communes satellites de Dublin ayant connu la plus forte croissance ces dernières années. Sa population a bondi de 20 % depuis 2016, les nouveaux arrivants étant surtout des familles de la classe moyenne cherchant à se loger hors d’une capitale devenue hors de prix même pour les gros salaires.

Attablées devant leurs boissons chaudes, Val Kiernan, 62 ans, sa fille Claudia Crampton, 27 ans, et leur amie Colette Nkunda résument les problèmes du lieu et ceux d’une bonne partie des électeurs irlandais, avant les élections générales du vendredi 29 novembre – consistant à renouveler le Dail, la Chambre des députés irlandaise, pour l’instant contrôlée par une coalition des deux grands partis centristes, Fine Gael et Fianna Fail, alliés aux Verts. « Ma première préoccupation, c’est l’accès à la santé. Il n’y a pas assez de médecins et il faut compter 70 euros pour une consultation avec un généraliste. Il existe un tarif social, mais il faut répondre à des critères d’éligibilité stricts », regrette Colette Nkunda, une Française d’origine rwandaise installée en Irlande depuis 1994.

Pour Val Kiernan, la priorité, c’est « le logement ». « La crise est massive. Je vis dans une maison de trois chambres, avec deux de mes quatre enfants adultes, mon plus jeune fils et ma fille aînée, qui vient de divorcer, et son petit garçon. Ils n’ont pas les moyens de trouver un logement abordable », déplore cette employée de Glencree, une organisation non gouvernementale (ONG) spécialiste de la résolution de conflits créée pendant la guerre civile nord-irlandaise. Sa fille Claudia, une musicienne, a passé quatre ans aux Pays-Bas, « où la crise du logement est moins grave qu’ici », observe-t-elle. Elle est revenue en Irlande mais elle dit connaître « tellement de jeunes qui quittent le pays, beaucoup pour l’Australie parce qu’ils n’arrivent pas à se loger. Je suis en location, mais mon propriétaire vend et je dois être partie en début d’année prochaine », ajoute la jeune femme, angoissée.

Il vous reste 78.77% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.