Crise au sein du groupe Bayard, bousculé par la crainte de l’entrisme de l’extrême droite

Les salariés du groupe Bayard, maison de presse et d’édition catholique, ont manifesté devant leurs locaux, à Montrouge (Hauts-de-Seine), durant leur heure de grève, le 28 novembre 2024.

Toute la semaine, le groupe Bayard a été en ébullition. L’annonce, lundi 25 novembre, du recrutement de l’ex-bras droit du milliardaire ultra-conservateur Pierre-Edouard Stérin, Alban du Rostu, au poste de directeur de la stratégie, a mis le feu aux poudres au sein de l’entreprise de presse et d’édition jeunesse. Celle-ci édite le quotidien catholique La Croix, l’hebdomadaire Le Pèlerin, le mensuel Notre temps et des titres phares de la presse jeunesse (Pomme d’Api, Astrapi, Okapi, J’aime lire…).

Les salariés y voient une volonté d’orienter la ligne d’ouverture et de catholicisme social du groupe, en raison du pedigree de cette nouvelle recrue : Alban du Rostu a participé au lancement du projet politique de M. Stérin, baptisé « Périclès », visant à mener la bataille des idées au service de valeurs identitaires, conservatrices et libérales. Cette désignation fait suite à la décision, par le nouveau président de Bayard, de s’associer notamment au conservateur Vincent Bolloré dans le rachat de l’école de journalisme ESJ Paris, une école privée non reconnue par la profession.

Déjà le choix de François Morinière pour diriger Bayard – nommé au printemps 2024, il a pris ses fonctions le 1er novembre – était interprété en interne comme une volonté de rappeler les fondamentaux religieux du groupe, et notamment à sa branche jeunesse, la plus rémunératrice, après un changement à la tête de la congrégation à l’été 2023. L’intronisation de M. Morinière, proche du cardinal Philippe Barbarin, a d’ailleurs fait l’objet d’une messe organisée par les assomptionnistes, selon les informations recueillies par Le Monde. Un fait inhabituel, même au sein de ce groupe de presse catholique.

« Pas de réacs dans nos rédacs, pas de fachos dans nos locaux », entonnaient 200 à 300 salariés devant le site de Bayard à Montrouge (Hauts-de-Seine), jeudi 28 novembre en début d’après-midi, pendant une heure de débrayage, avant une possible grève la semaine prochaine. Du jamais vu, selon plusieurs salariés, presque surpris par la vigueur de la mobilisation dans un groupe de presse qui n’a pas la culture de l’affrontement.

A la même heure, à Toulouse, un autre rassemblement avait lieu devant les locaux de la filiale Milan Presse (Wapiti, 1jour1actu). La veille, lors de l’ouverture du Salon du livre jeunesse de Montreuil (Seine-Saint-Denis) une banderole « Chez Bayard, aucune place pour l’extrême droite » avait été déployée sur le stand de Bayard jeunesse par plusieurs salariés et M. Morinière avait été interpellé par l’autrice Murielle Szac. « Sans les auteurs, vous n’aurez plus rien à vendre », le mettait-elle en garde.

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