Vente du Doliprane : « Sanofi et l’Etat ont tous deux fait des compromis »

Le Doliprane s’apprête à commencer une nouvelle vie. Après plus d’un demi-siècle dans le giron de Sanofi, sa maison mère, le médicament le plus vendu de France passera bientôt sous la houlette du fonds d’investissement américain CD&R.

Le laboratoire pharmaceutique a confirmé, lundi 21 octobre, la prochaine arrivée du fonds étranger, avec lequel il poursuit des négociations exclusives, à hauteur de 50 % du capital d’Opella, sa filiale dévolue aux médicaments sans ordonnance et aux compléments alimentaires. Avec un chiffre d’affaires de 5,2 milliards d’euros et un portefeuille de produits de plus d’une centaine de marques, la division santé grand public du laboratoire tricolore a fait l’objet de nombreuses convoitises depuis l’annonce du projet de cession, en octobre 2023.

Sa future vente a surtout provoqué une vive polémique dans l’Hexagone, où elle emploie 1 700 personnes, en raison de l’attachement des Français au Doliprane. Un émoi que Paul Hudson, le directeur général de Sanofi, a bien compris. Le patron britannique du laboratoire, qui a découvert la petite boîte jaune à son arrivée à la tête du groupe pharmaceutique, en 2019, l’assure : l’antidouleur fétiche des Français conservera sa souveraineté nationale.

Désireux de recentrer son activité sur le développement de médicaments innovants et de vaccins, Sanofi a enchaîné les restructurations en ce sens ces dernières années. En 2022, il avait ainsi choisi de s’affranchir de sa division de principes actifs, en l’introduisant en Bourse sous le nom d’Euroapi.

La vente de votre filiale de médicaments sans ordonnance, Opella, qui abrite notamment le Doliprane, suscite de nombreuses réactions en France. Cela vous surprend-il ?

Je comprends l’émotion que cela a provoquée, mais il n’a jamais été question de transiger sur le Doliprane. Avec la pandémie due au Covid-19, j’ai pu me rendre compte de son importance pour les Français. Nous avons produit des dizaines de millions de boîtes supplémentaires à cette époque, plus que ce que nous avions jamais produit auparavant. Les gens gardaient des boîtes dans leurs armoires à pharmacie au cas où. Cela montre l’attachement des Français à ce médicament. A bien des égards, le Doliprane est un membre de confiance de la famille. Il n’y a jamais eu de débat concernant sa souveraineté.

Pourquoi avoir fait le choix de vous séparer de cette filiale, qui affiche pourtant une rentabilité élevée, avec une marge d’exploitation de 27,8 % ?

Sanofi ambitionne de devenir un pure player de la biopharmacie. Nous voulons être le leader mondial de l’immunologie. Pour cela, nous avons besoin d’investir dans la science afin de développer des médicaments innovants. De son côté, Opella a beaucoup grandi depuis cinq ans, et a besoin d’investissements pour continuer à se développer et procéder à des acquisitions. Or, lorsque nous prenons la décision d’allouer des capitaux, nous sommes plus susceptibles de privilégier l’immunologie que les produits en vente libre. D’où la nécessité pour Opella de quitter aujourd’hui le nid.

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