L’Italie est de retour à Damas. Et son gouvernement se verrait bien en instigateur d’un dégel des relations entre l’Union européenne (UE) et le régime syrien. Douze ans après le départ de son dernier ambassadeur, Rome a nommé un chef de mission dans la capitale syrienne, le diplomate Stefano Ravagnan, responsable du dossier syrien au ministère italien des affaires étrangères.
Contrairement au chargé d’affaires qu’il remplace, basé à Beyrouth depuis 2018, ce dernier résidera à Damas. Ministre plénipotentiaire n’ayant pas formellement le titre d’ambassadeur, il n’aura pas à présenter ses lettres de créances au dictateur Bachar Al-Assad mais sa nomination, effective après l’été, implique une montée en grade de fait de la représentation de l’Italie.
« Notre décision s’inscrit dans la volonté italienne de repenser la stratégie de l’UE sur la Syrie. La situation sur le terrain suggère un engagement plus pragmatique », explique-t-on à Rome. L’enjeu serait d’établir de nouvelles relations, « pour empêcher que l’effondrement socio-économique de la Syrie ne produise une nouvelle vague de réfugiés, notamment vers les pays limitrophes ». Les traductions concrètes que pourrait avoir ce positionnement restent cependant incertaines.
Après avoir reconquis les deux tiers du pays avec l’aide de l’Iran et de la Russie entre 2016 et 2018, le régime de Bachar Al-Assad a consolidé sa mainmise sur le pouvoir. La destruction des infrastructures et du tissu industriel par les bombardements, la quarantaine internationale auquel le gouvernement est soumis, qui empêche toute reconstruction, et les sanctions des Etats-Unis et de l’Union européenne, ont précipité 90 % de la population sous le seuil de pauvreté. Mais cette crise n’a pas fait plier M. Assad, qui s’obstine à refuser toute transition démocratique et tout geste d’apaisement, comme par exemple une libération de prisonniers.
« Un coup diplomatique »
« Pour l’Italie, le retour d’un représentant à Damas est un coup diplomatique. Il s’agit de se mettre en lumière sur un dossier au sujet duquel personne ne bouge. Il n’y a pas forcément de vision stratégique derrière », analyse Maria Luisa Fantappiè, chef du programme Méditerranée, Moyen-Orient et Afrique de l’Istituto Affari Internazionali, un influent centre de recherche romain. L’approche italienne a cependant déjà eu des résultats. A la mi-juillet, le ministre italien des affaires étrangères, Antonio Tajani, a signé avec ses homologues autrichien, croate, chypriote, tchèque, grec, slovaque et slovène une lettre adressée au chef de la diplomatie européenne Josep Borrell demandant de « revoir et d’évaluer » son approche vis-à-vis de la Syrie.
Il vous reste 41.64% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.