La « Revue du crieur » tire sa révérence

Un dossier d’une grosse soixantaine de pages sur « La solitude de Gaza », illustré en une par le dessin d’un « crieur » coiffé d’un keffieh, et composé d’articles signés de l’essayiste Mona Chollet, de l’anthropologue Marion Slitine ou encore de l’architecte Eyal Weizman. Des enquêtes sur « Ce qui a nourri et nourrira encore la menace RN », la lutte « pour faire exister les mémoires queer », les questionnements de la « gauche radicale étasunienne » à propos de la politique menée par Joe Biden, etc.

La lecture du sommaire du prochain numéro de la Revue du crieur, disponible en librairie à partir du 14 novembre, raconte à elle seule la singularité de ce mook – du nom de ces publications au croisement du livre pour leur densité et du magazine pour leur périodicité : éclectisme et engagement des « enquêtes sur les idées et la culture », acuité du décryptage, profondeur de l’analyse, prééminence des formats longs.

Cette nouvelle parution est cependant aussi la dernière, annonce le Crieur, cocréé par le site d’information Mediapart et les éditions La Découverte, dans son éditorial. « Après vingt-cinq numéros et près de dix ans d’existence (2015-2024), le Crieur choisit de tirer sa révérence », est-il écrit. « La fin de cette aventure se fait sans crier victoire tant la bataille culturelle, face à des forces réactionnaires munies de bazookas médiatiques, demeure essentielle si l’on veut espérer sortir de la situation politique mortifère du moment », poursuit l’article qui ouvre ces 160 dernières pages (vendues au prix de 15 euros).

Une « belle aventure »

« Nous considérons tous que le Crieur a été une belle aventure, commente-t-on à La Découverte. Aujourd’hui, ça marche moins bien, alors on arrête. Mais, avec Mediapart, nous réfléchissons à d’autres projets. » La Revue du crieur pouvait compter sur environ 500 abonnés, précise la maison d’édition, et « autour de 3 000 à 4 000 ventes », en tout, par numéro – deux par an. Le premier numéro, en 2015, avait attiré 15 000 acheteurs, le deuxième, « plus de 10 000 ».

Mais, dans les librairies, les mooks se sont multipliés, rendant chacun d’eux moins unique, mais aussi moins identifiable par les lecteurs. C’est ainsi que les revues pionnières sur ce secteur, XXI et 6Mois, ont affronté un redressement judiciaire en 2023 avant d’être reprises par le groupe Indigo, ou encore qu’Usbek & Rica vient de changer de nom et de réduire sa pagination en devenant Futu&R, deux ans après son rachat par le groupe CMI.

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