Entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni, une « relation spéciale » à l’épreuve de Trump

Entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni, une « relation spéciale » à l’épreuve de Trump

Peu après les attentats du 11 septembre 2001, l’ambassade du Royaume-Uni à Washington remit à la Maison Blanche un buste de Winston Churchill réalisé par l’artiste Jacob Epstein. Le symbole était clair : dans les moments sombres, les Britanniques se voulaient les alliés les plus fiables des Américains, réitérant leur attachement à leur « relation spéciale ». L’expression est attribuée à Churchill, qui l’aurait utilisée la première fois le 5 mars 1946 : lors d’un discours prononcé à Fulton, dans le Missouri, il avait insisté sur la nécessité, pour les deux Etats, de maintenir l’étroite collaboration militaire élaborée durant la seconde guerre mondiale, afin d’assurer la paix dans le monde.

George W. Bush installa la sculpture de l’homme d’Etat britannique (Churchill se rendait régulièrement à la Maison Blanche au début des années 1940, quand il essayait de convaincre Franklin Delano Roosevelt d’entrer en guerre contre l’Allemagne nazie) dans le bureau Ovale. En 2009, elle fut retirée avec l’arrivée de Barack Obama – décision que Boris Johnson, alors maire de Londres, attribua à « l’aversion ancestrale d’un président aux origines kényanes pour l’Empire britannique ». Elle retrouva le bureau Ovale en 2017 et jusqu’à la fin du premier mandat de Donald Trump en 2021, disparut de nouveau lors de l’administration Joe Biden (2021-2025), avant de reprendre sa place initiale, en janvier, comme l’avait promis M. Trump au moment de sa seconde victoire électorale. Les médias britanniques ont alors soupiré d’aise, le retour en grâce du buste de Churchill compensant le fait que, contrairement à une tradition bien établie, Keir Starmer n’ait pas été le premier dirigeant occidental à rencontrer le président américain après sa prestation de serment – Emmanuel Macron l’avait devancé de trois jours, le 24 février.

Ces questions de protocole et de buste en bronze, peut-être superficielles à l’aune des bouleversements du monde, illustrent bien l’importance de la relation spéciale aux yeux des Britanniques et leur sentiment d’insécurité dès que celle-ci paraît menacée. Ils la considèrent comme indispensable, une boussole de leur politique étrangère, un fondement de leur sécurité. Pourtant, cette relation va mal. Certes, le Royaume-Uni est jusqu’à présent épargné par Donald Trump, qui ne l’a pas menacé, contrairement à l’Union européenne (UE), de droits de douane sur l’ensemble de ses exportations. Le nouveau président américain s’est comparé à Churchill (« un grand leader »), a loué le roi Charles III (« un homme formidable »). Mais il a entrepris des négociations sur l’Ukraine avec Vladimir Poutine sans consulter ni Kiev, ni Londres, ni aucune autre capitale européenne. Il a laissé Elon Musk proférer des accusations sans fondement contre le premier ministre travailliste, Keir Starmer, et n’a pas réagi davantage quand son vice-président, J. D. Vance, a offensé l’armée britannique. Sur la chaîne de télévision Fox News, le 3 mars, ce dernier a moqué « ces pays quelconques » – la France et le Royaume-Uni – qui proposent d’envoyer des troupes de maintien de la paix en Ukraine.

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