Elections européennes : le RN officialise la rupture avec son allié allemand de l’AfD

Le Rassemblement national (RN) préfère le risque de l’isolement à celui de la polémique. A deux semaines du scrutin européen, il rompt avec le parti Alternative pour l’Allemagne (AfD), l’un de ses principaux alliés au sein du groupe Identité et Démocratie (ID). « Nous ne siégerons plus avec eux lors du prochain mandat », a définitivement tranché Alexandre Loubet, directeur de la campagne menée par Jordan Bardella, mardi 21 mai, auprès de Libération.

Sollicité par Le Monde, le parti confirme la rupture, prise « à la suite des récentes déclarations de l’AfD ». Une issue que Marine Le Pen distillait en privé. « Ma religion est faite sur l’AfD, confiait la semaine dernière la triple candidate à la présidentielle. Un mouvement tombé sous la coupe de sa frange la plus radicale ne m’apparaît plus constituer un allié fiable et convenable. »

C’était avant la publication, dans le quotidien italien La Repubblica et le britannique Financial Times, d’un entretien de Maximilian Krah, tête de liste de l’AfD au scrutin du 9 juin. Dernière des polémiques émaillant la campagne du parti d’extrême droite allemand : l’eurodéputé y soutient que tout membre des SS, organisation paramilitaire pivot du projet totalitaire d’Adolf Hitler, ne devrait pas être considéré « automatiquement comme un criminel » : « Parmi les 900 000 SS, il y avait aussi beaucoup d’agriculteurs : il y avait certes un pourcentage élevé de criminels, mais ils ne l’étaient pas tous. »

« L’éléphant dans la pièce »

Loin de craindre les conséquences que pourrait tirer le RN des provocations et procédures judiciaires dans lesquelles s’englue son mouvement, M. Krah a profité de l’entretien à La Repubblica pour mettre au défi son partenaire français : « Si nous sommes expulsés, je doute qu’ils parviendront à atteindre le nombre de sept pays requis pour former un groupe ». Las de s’expliquer à chaque polémique de l’AfD, l’ex-Front national prend donc le risque de longues tractations à Bruxelles et Strasbourg, et celui de devoir constituer un groupe d’une taille réduite, privé de représentants du plus grand pays d’Europe. Comme le disait elle-même Marine Le Pen au Monde en décembre 2023, « c’est difficile d’envisager une stratégie européenne en faisant fi des Allemands. C’est l’éléphant dans la pièce ».

La « stratégie européenne » est toutefois le cadet des soucis d’un parti qui ne regarde qu’en direction de 2027 et n’a jamais investi réellement la démocratie européenne. Pour préserver l’image du RN, la séparation entre les deux partenaires semblait inéluctable. L’AfD n’a cessé d’éprouver ces derniers mois la « copropriété » mise en scène par Marine Le Pen pour justifier ses liens avec des partis à la radicalité revendiquée.

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