Le président fédéral de la République autrichienne, Alexander Van der Bellen, a annoncé, lundi 6 janvier, avoir chargé le Parti de la liberté d’Autriche (FPÖ, extrême droite), conduit par Herbert Kickl de former un gouvernement après l’échec des négociations entre conservateurs, sociaux-démocrates et libéraux.
Au vu de « la nouvelle situation (…), j’ai chargé » M. Kickl, dont le parti était arrivé premier lors des élections législatives fin septembre avec près de 29 % des voix, de mener des discussions, a déclaré le chef d’Etat, ajoutant qu’il n’avait « pas été facile de prendre » une telle décision. Si les pourparlers aboutissent, et que le FPÖ obtient le poste de chancelier, ce serait la première fois depuis 1945 qu’un représentant d’un parti fondé par d’anciens nazis arriverait au poste le plus important des institutions autrichiennes.
Le pays alpin, membre de l’Union européenne (UE), a plongé dans l’incertitude politique samedi lorsque le chancelier conservateur, Karl Nehammer, a mis fin aux pourparlers visant à former un gouvernement centriste excluant l’extrême droite. Dans la foulée, M. Nehammer a annoncé qu’il démissionnerait « dans les prochains jours » de son poste de chancelier et de la présidence du Parti populaire (ÖVP, conservateurs), promettant « une transition ordonnée ». Il occupait les deux fonctions depuis fin 2021.
La décision du président intervient après une volte-face politique des conservateurs autrichiens, qui ont déclaré dimanche être prêts à entamer des négociations avec l’extrême droite afin de former un nouveau gouvernement, après l’échec des discussions de coalition avec les libéraux et les sociaux-démocrates.
Des centaines de manifestants se sont rassemblés lundi devant le palais de la Hofburg, siège de la présidence, criant « Nazis dehors ».
« Une nouvelle voie »
Lors d’une réunion des leaders de l’ÖVP dimanche, le secrétaire général du mouvement, Christian Stocker, a été désigné chef du parti par intérim. M. Stocker a déclaré avoir été autorisé par son parti à entamer des négociations de coalition avec l’extrême droite. « Ce pays a besoin d’un gouvernement stable aujourd’hui, et nous ne pouvons continuer de perdre un temps que nous n’avons pas dans des campagnes électorales ou des élections », a-t-il ajouté.
Peu avant, le président autrichien avait annoncé qu’il allait rencontrer lundi matin Herbert Kickl, pour « discuter de la nouvelle situation ». « Les voix au sein de l’ÖVP qui excluaient de travailler avec [M.] Kickl se sont faites beaucoup plus discrètes, a déclaré le président à la presse. Cela signifie qu’une nouvelle voie qui n’existait pas auparavant s’est ouverte. »
Lors d’une conférence de presse, M. Stocker s’est réjoui de la décision du président de discuter avec le leader d’extrême droite, dont le parti avait rassemblé presque 29 % des voix aux législatives mais qui jusque-là n’avait pas trouvé de partenaires pour former un gouvernement.
Le président autrichien avait initialement demandé aux conservateurs de former un gouvernement stable qui respecte les « fondations de notre démocratie libérale ». Par le passé, il a émis plusieurs fois des réserves à l’égard de M. Kickl, dont le parti est donné à 35 % dans les derniers sondages.
Dans un communiqué, le chef du parti d’extrême droite avait qualifié samedi de « losers » les partis impliqués dans les discussions de coalition. « Au lieu de la stabilité, nous avons le chaos » après trois « mois gâchés », a-t-il ajouté.
Les conservateurs de l’ÖVP étaient arrivés en seconde position aux législatives avec 26 % des voix, suivis par les sociaux-démocrates (SPÖ, centre gauche) à 21 %. L’ÖVP a participé aux différents gouvernements du pays de 9 millions d’habitants depuis 1987. Il a déjà gouverné à deux reprises avec le FPÖ, partenaire minoritaire, en 2000 et en 2017.